Parfois, les évènements dérapent, en voyage. On ne souhaite jamais que ça se produise, mais il arrive que, malgré toutes nos précautions, on perd le contrôle des circonstances. Et on espère alors que les dommages soient minimes. J’ai vécu une telle perte de contrôle à Hanoi, lors de mon retour de Sapa. Et j’espère que ce sera la dernière fois que je vivrai une expérience semblable.
Le début
En compagnie de mes amis Ingrid et Hamish, j’ai pris un bus de nuit pour revenir de Sapa. Après avoir été traités comme de la merde par le personnel du bus et après avoir passé une nuit médiocre, calés dans nos couchettes au fond du véhicule, on est arrivés à Hanoi vers 4 h 30. On allait tous dans le même secteur, alors on a cherché un taxi pour s’y rendre. Or quelques chauffeurs se tenaient près du bureau de la compagnie de bus, notre destination finale. Un couple formé d’une Vietnamienne et d’un Français ont négocié un taxi avant nous et ils nous ont dit de ne pas payer plus de 100 000 dongs (environ 5 $ CAN; ce qui était déjà trop cher, de toute façon. Enfin.). On a ainsi commencé à discuter avec un chauffeur, qui, de toute évidence, n’avait vraiment pas envie de nous mener à bon port. Sa mauvaise foi et sa façon minable de négocier nous ont rebuté, mais apparemment, il était celui avec lequel on devait embarquer. On a essayé de convaincre un autre chauffeur de nous prendre, mais celui-ci nous a renvoyés à son collègue grincheux. Après une âpre discussion, on a convenu de ne payer que 100 000 dongs. On est alors partis vers notre hôtel.
Le moment où tout a basculé
Très vite, Ingrid a réalisé qu’elle avait oublié un de ses sacs dans le bus. On a donc demandé au chauffeur d’y retourner. On avait parcouru quelques centaines de mètres seulement. Or il voulait qu’on lui donne 50 000 dongs (environ 2,50 $ CAN) de plus pour ce détour. On a refusé de payer une telle somme, prétextant qu’on était tout près, qu’on venait juste de partir. Il n’a pas du tout apprécié. Une dispute a alors éclaté. Il ne voulait pas rebrousser chemin. À ce moment-là, Hamish est sorti de la voiture. Le chauffeur a ensuite barré les portes et il a pesé sur l’accélérateur. Ingrid a sauté sur le volant, elle a commencé à klaxonner en lui hurlant d’arrêter. Il a fini par immobiliser le véhicule et débarrer les portes. Ingrid est aussitôt partie vers le bus, laissant Hamish et moi avec l’homme. On l’a alors engueulé. Il voulait toujours qu’on le paie. Considérant qu’il a essayé de nous enlever, Ingrid et moi, Hamish et moi avons refusé de lui donner de l’argent. On est partis à notre tour. Il était furieux.
Comme dans un mauvais film
Hamish et moi avons marché – et couru – vers le bus. À un certain moment, Hamish a aperçu le chauffeur, plus loin sur le trottoir. Il nous attendait. Matraque à la main. On a aussitôt traversé la rue pour changer de trottoir. L’homme a alors quitté les lieux. On a fini par arriver au bus. Pas de trace d’Ingrid. On a décidé d’attendre au bureau, au cas où elle reviendrait. Après une heure, on a convenu qu’elle ne ne se pointerait pas. On a donc décidé de s’éloigner du bureau. Après quelques minutes de marche, on a hélé un taxi et on s’est rendus à notre hôtel. Or il était fermé. Il était environ 6 h 45. On a donc été dans un hôtel ouvert, juste en face, et j’ai commencé à écrire un courriel à Ingrid. Pendant que j’écrivais, notre hôtel a fini par ouvrir ses portes. Je me suis aussitôt précipité à la réception pour demander si Ingrid était là. L’employé m’a alors remis un message sur un bout de papier. Un message d’Ingrid. Elle était bel et bien là, dans une des chambres. J’ai rarement ressenti un tel soulagement, dans ma vie. J’ai été avertir Hamish qu’Ingrid était là et qu’elle allait bien, puis j’ai été dans la chambre. J’ai ouvert la porte et j’ai vu Ingrid. Je l’ai étreinte et je lui ai demandé si elle allait bien. Elle m’a dit que oui. Elle m’a ensuite expliqué ce qui lui était arrivé.
Un cauchemar
Après nous avoir quittés, elle s’est rendue au bus. Elle a récupéré son sac, puis elle a pris un autre taxi pour se rendre à l’hôtel. Or le premier chauffeur, le fou furieux, a retrouvé ce taxi et il l’a forcé à s’arrêter. Il a alors demandé au chauffeur de baisser la fenêtre du siège où Ingrid était assise. Ce qu’il a fait. Le fou furieux l’a ensuite menacée avec sa matraque (qui comportait des lames, sur une de ses extrémités) et lui a exigé de l’argent. Elle lui a donc remis ce qu’elle avait sur elle. Il est alors parti. Ingrid était en état de choc. D’autant plus que le chauffeur de son taxi n’a rien fait pour empêcher cette agression. Pire encore, quand Ingrid est arrivée à l’hôtel, le chauffeur lui a demandé deux fois le tarif convenu. Exténuée, elle lui a donné l’argent; elle avait juste envie que tout s’arrête. Elle est sortie du taxi et elle s’est mise à pleurer sur le trottoir, devant l’hôtel fermé. Quelqu’un de l’établissement l’a aperçue, lui a ouvert la porte et elle a pu aller dans une chambre, en se demandant ce qu’il nous était arrivé. Puis, j’ai fini par arriver dans la chambre, où j’ai pu lui raconter ma version de l’histoire. On était très heureux que toute cette mésaventure soit enfin terminée.
Une réalité à ne pas oublier
Je voyage depuis des années et je n’ai jamais vraiment eu de problème, à part la fois où l’on a volé mon appareil photo à Barinas. Cependant, lors de cet incident, je n’avais pas eu peur. Je n’en avais pas eu le temps, tout était arrivé trop vite. Mais cette fois, à Hanoi, j’ai eu le temps de réfléchir, d’envisager différents scénarios et j’ai eu peur. Peur de perdre mon amie, peur qu’il lui arrive quelque chose de terrible. L’ignorance, dans un tel contexte, est horrible. Ne pas savoir ce qui est arrivé à quelqu’un qui compte pour moi était un sentiment atroce. C’était un des pires moments de ma vie. Or cette fois, tout s’est bien terminé; personne n’a été blessé. Mais toute cette histoire m’a rappelé que, parfois, il ne suffit que de bien peu pour qu’une situation dégénère complètement. Oui, un tel dérapage PEUT arriver. Oui, les voyages comportent des risques. Et même quand on fait le nécessaire pour atténuer ces risques, ils peuvent surgir quand même. Il ne faut jamais l’oublier. C’est pourquoi j’ai écrit ce texte.
J’avais déjà entendu parlé des ces problèmes avec les taxis… Je suis contente que tout ce soit bien fini pour vous.
Merci! Le tout n’a pas duré bien longtemps, mais ça a paru bien plus long.
En tout cas, cela a l’air long et traumatisant quand tu en parles…
C’est ce que je voulais rendre, comme impression, en écrivant ce billet. Content de voir que tu as saisi mon intention.
ET bien… quelle mésaventure ! A coté de ça, les désagréments rencontrés lors de ma journée à la réserve spéciale de l’Ankarana, à Madagascar, me semblent bien dérisoires…
On ne souhaite jamais vivre des mésaventures, mais elles font hélas bel et bien partie des voyages. L’important, c’est que tout rentre dans l’ordre. Content de voir que ça s’est bien terminé pour vous aussi.
Coucou Stéphane!
Je découvre ton blog (qui est super d’ailleurs!) et je tombe par la même occasion sur ton article. Heureusement, tout se termine bien mais je comprends le traumatisme que vous avez dû vivre!
A bientôt
Bonjour Charlotte! Content de pouvoir te compter parmi mes lectrices/lecteurs. Merci pour tes bons mots. Oui, quel bonheur que tout se soit bien terminé. Une expérience que je ne souhaite jamais revivre…