Étudier à l’étranger constitue une façon de joindre l’agréable à l’utile. En effet, cette manière de voyager permet à celles et ceux qui l’adoptent de non seulement parfaire leur éducation, mais aussi de sortir de leurs zones de confort, d’apprendre une nouvelle langue, de créer de nouvelles amitiés, de découvrir une culture, etc. Mon ami Jérôme Poulin a eu la chance d’étudier à l’étranger à plusieurs reprises, au fil des années, et il nous livre ici ses impressions sur cette manière de voyager.
Décris ton parcours académique.
J’ai fait une première année d’université en biologie, car je m’étais laissé convaincre par le conseiller d’orientation du cégep [collège d’enseignement général et professionnel] qu’il y avait plus d’emplois dans ce domaine. L’année suivante, j’ai décidé d’entrer au baccalauréat en physique régime coop (avec stages) avec module en génie microélectronique. J’ai complété mon bac en 4 ans puis j’ai immédiatement commencé une maîtrise en génie physique à l’École Polytechnique à l’été 2003. À la fin de ma maîtrise, j’ai fait un stage de 6 mois en Australie, puis j’ai commencé le doctorat en cotutelle avec l’Australie (Sydney et Perth) et l’École Polytechnique de Montréal.
Pourquoi faire des études à l’étranger?
J’ai toujours pensé que c’était une profonde expérience de vie de pouvoir vivre dans un autre pays. De dépasser le stade du tourisme, [de faire en sorte] que la vie dans le pays étranger devient notre quotidien. À ce moment on remarque et on apprend des choses différentes que dans un contexte touristique, c’est une expérience beaucoup plus intense! À la fin de ma maîtrise, j’ai fait un stage de 6 mois en Australie. On m’a alors proposé de poursuivre mon doctorat là-bas, ce que j’ai accepté en me disant: “why not!”.
Selon toi, quelles qualités devrait avoir un-e étudiant-e qui souhaite étudier à l’étranger?
Je crois qu’en premier il faut être fonceur et se dire que peu importe comment ça se déroulera, ce sera toute une expérience de vie. Je crois aussi qu’il faut être capable de passer du temps seul, c’est certain que je me suis fait des amis, mais je savais aussi que ce serait temporaire et il y a aussi une barrière culturelle. Donc je ne me suis pas autant investi dans la vie sociale là-bas que je le fais ici, mais j’ai mieux développé mes autres objectifs personnels et fait des expériences différentes de celles que je ferais ici. Ainsi, j’ai passé plus de temps au laboratoire et à lire mais aussi faire plus de sport et d’entraînement.
Quels sont les plus grands défis d’étudier à l’étranger?
Je crois que le principal défi est l’absence de nos proches et amis, surtout quand on manque des fêtes importantes et les activités qu’on aime le plus. Le décalage horaire fait aussi que la communication n’est pas aussi facile qu’on peut le croire avant de vivre l’expérience. Pas toujours évident de raconter sa vie quand on vient de se lever à 7 h 30 le matin au téléphone! Je trouvais que durant 4 mois ce n’est pas un si gros défi, mais pendant 2 ans ça devient très important et on ressent l’isolement.
Quels sont les grandes joies d’étudier à l’étranger?
Je crois qu’être dans un milieu culturel différent et un fonctionnement de la vie qui est un peu différent à tous les niveaux change complètement notre perspective du quotidien et du monde en général. C’est comme un total “reboot” de notre vie quotidienne. Forcément dans ce contexte, on développe une routine et des habitudes différentes et c’est un contexte d’apprentissage extraordinaire! Pour donner un exemple, après avoir vécu à Perth, j’ai développé une énorme appréciation du service de la STM [Société de transport de Montréal] à Montréal :-)
Quel est le plus grand mythe associé aux études à l’étranger?
Je crois que ce que j’ai entendu est qu’il est difficile d’être sérieux dans les études et qu’on en retire très peu en apprentissage à l’école, car il y a tant à apprendre dans l’environnement et on a tendance à vouloir sortir plus pour rencontrer des gens et faire le party. Selon mon expérience c’est un mythe, car tout ce qu’on partage de notre expérience avec nos proches sont ces éléments. On ne va quand même pas leur parler en détails de nos devoirs, mais je crois que l’apprentissage est réel et à bien des niveaux, ce n’est pas juste le party et les vacances. Quand on étudie à l’étranger, on sort rapidement du rôle de touriste même si nos amis qui sont restés au pays nous perçoivent comme cela.
Comment compares-tu vivre et étudier dans un pays et effectuer un simple voyage dans ce
même pays?
C’est vraiment au niveau des liens avec les autres. On se forme un groupe d’amis, des nouveaux collègues de travail; on se bâtit littéralement un nouveau réseau social. Au fil des interactions vont se développer un apprentissage culturel et une connaissance du pays beaucoup plus approfondis que dans un contexte touristique.
Tu as aussi participé à des conférences internationales, en lien avec ton champ d’études. En
quoi voyager pour une conférence diffère des autres types de voyage?
Les conférences ont un genre de format standard et on répète souvent les mêmes expériences d’une à l’autre. C’est très agréable mais en même temps on n’a aucune liberté. Souvent les organisateurs planifient notre horaire du temps, même en dehors de la conférence, donc on est guidés directement dans les bons restaurants, le magasinage et les courtes sorties touristiques. On se sent un peu comme un genre de mouton qu’on promène pour lui montrer un pays. Dans les autres voyages, il y a la liberté d’horaire et on fait nous-même la planification des activités. Autre avantage du format conférence: aucune planification à faire, toutes dépenses payées et on vit une expérience touristique au moins 50 % du temps :-)
Qu’est-ce que le fait d’étudier à l’étranger t’a apporté, tant au plan personnel que professionnel?
Un apprentissage unique et complémentaire à ce que j’ai vécu au Canada. En Australie, ils sont experts dans le design et la fabrication de fibres optiques avancées et j’ai beaucoup appris dans ce contexte; alors, depuis mon retour, j’ai une expertise dans ce domaine important qui est supérieure à celle de tous les professeurs ici! Au plan personnel, ça m’a permis de moins prendre à cœur nos problèmes politiques et sociaux. J’ai vu qu’en Australie ils n’étaient pas très environnementalistes. Par exemple, la University of Western Australia ne fait aucun recyclage, tout le papier va directement au dépotoir; du coup, je trouve moins choquant que les entreprises au centre-ville de Montréal ne recyclent pas leur papier. Ça ne me choque plus alors je me sens
plus zen :-)
Avec du recul, qu’est-ce que tu aurais aimé savoir avant de partir en Australie, mais que tu ne
pouvais savoir avant ton départ?
Je ne saurais répondre à cette question.
Comment fais-tu pour aimer la vegemite?
Humm il faut vraiment comprendre ce qu’est ce goût. C’est tellement unique qu’automatiquement tout le monde trouve cela mauvais. Mais quand on accepte que bien que ça ressemble à du Nutella, c’est plutôt un goût de fumé/salé avec une touche de poisson, ça devient plus acceptable. Et on devient fier d’aimer cela, on se sent plus intégré à l’Australie ha ha!
Note: il faut en manger souvent et trouver cela mauvais souvent avant que le switch se fasse dans notre tête :-)
Quel est le titre exact de ta thèse?
Toward cold atom guidance in a hollow-core photonic crystal fibre using a blue detuned hollow laser beam.
Quels sont tes projets?
J’applique en ce moment pour des postes de chef de projet en industrie (recherche et développement) dans le domaine des télécommunications, fibres optiques et lasers à Montréal, mais je regarde aussi un peu vers Sydney :-)
La suite de cette entrevue sera publiée ce jeudi.
L’échange dans le cadre scolaire est souvent la première opportunité pour effectuer un voyage au long cours et c’est ensuite la porte ouverte de nombreux autres voyages.
Tout à fait. C’est aussi une expérience particulière en elle-même, avec des caractéristiques qu’on ne retrouve pas nécessairement dans d’autres types de voyage (ex. l’esprit de communauté entre étudiant-es). Je pense que ça vaut la peine de l’essayer.