Le 7 juillet 2015 dernier, à León, une célébration sandiniste a eu lieu pour souligner le 36e anniversaire de la libération du fortin situé à environ 4 kilomètres à l’extérieur de la ville. Cet évènement aurait contribué à la chute de la famille Somoza, qui a dirigé le Nicaragua de façon dictatoriale pendant plus de 40 ans. Les sandinistes étaient les opposants au régime des Somoza; ils se réclamaient de l’idéologie du général Augusto Sandino (1895 – 1934), qui a lutté contre l’influence des États-Unis dans les politiques du Nicaragua (et celles des autres pays d’Amérique latine). La date du 19 juillet est d’ailleurs considérée comme une fête nationale, car ce jour-là les Somoza ont fui le pays. Ce jour est encore aujourd’hui appelé « La Liberación ».
Une très, très brève histoire du mouvement sandiniste
L’histoire du mouvement sandiniste est donc intimement liée à celle du Nicaragua. Le Frente Sandinista de Liberación Nacional (FSLN) a été fondé en 1961, dans le but de lutter contre la dictature des Somoza. Après plusieurs années de combats, le Front a réussi à atteindre son objectif en juillet 1979, avec la démission d’Anastasio Somoza Debayle. De vastes réformes et divers programmes sociaux ont alors été lancés, dont la nationalisation de plusieurs secteurs d’activités (les mines et les pêches, entre autres). Aujourd’hui, bien des gens s’affichent toujours comme sandinistes. Comme quoi l’histoire n’a pas été oubliée.
Et c’est un départ
Le départ de la marche a eu lieu au Parque central, vers 15 h 45 (et non à 15 h, tel que prévu). Le cortège s’est peu à peu rendu au fortin. La foule devenait de plus en plus compacte à mesure que la marche approchait de la colline. La musique tonitruante, crachée par des hauts-parleurs installés dans des boîtes de pickup, et les bières consommées sans vergogne (surtout par les hommes, à ce que j’ai pu voir) créaient un contraste avec le sérieux des évènements célébrés. Aussi, quelques hommes, visiblement ivres, s’amusaient à tirer du mortier à intervalles réguliers. Ils tiraient des pétards, bien sûr, mais l’effet était tout de même saisissant.
Une fois sur la colline, j’ai constaté que les gens arrivaient de plusieurs directions à la fois. Ils étaient d’âges différents, mais de toute évidence, ils partageaient les mêmes convictions. Les hauts-parleurs continuaient de vomir leurs décibels, des gens hurlaient des slogans, des enfants couraient et jouaient ça et là. Ils ne devaient pas tout comprendre de la cérémonie, mais leur indéniable enthousiasme ajoutait une énergie aux festivités. Aussi, de la nourriture était vendue sur place, pendant que les mortiers continuaient de lancer leurs pétards, laissant derrière des traînées de fumée. Les différentes odeurs se confondaient ainsi en un parfum de victoire. Bref, tout ça ressemblait davantage à un party qu’à un rassemblement politique.
La célébration sandiniste fut aussi marquée par les discours enflammés de quelques dignitaires. La foule électrisée en redemandait, sous les tressaillements des drapeaux sandinistes. Puis, des artistes ont joué de la musique engagée jusqu’au coucher du soleil. Les gens semblaient heureux et une fierté palpable embaumait l’air. À la tombée de la nuit, la foule s’est dispersée et chacun-e est rentré-e.
Une belle rencontre
En chemin vers le fortin, j’ai rencontré Rafael, un homme de León de 39 ans. Il m’a parlé de l’histoire de la ville, de ses souvenirs d’enfance. On a bu, on a jasé, on est rentrés en ville ensemble pour continuer nos discussions autour d’une bière dans un restaurant. Fantastiques conversations. Ce genre de contact plus personnel avec des « locaux » est l’un de mes grands plaisirs, en voyage. J’ai quitté Rafael vers 21 h et je suis rentré à mon auberge, heureux d’avoir pris part à cette marche.
Sans prétention
Je n’ai pas la prétention de connaître l’histoire du Nicaragua, même si j’avais lu un peu sur le sujet avant d’arriver dans le pays; je me souvenais aussi de « l’Irangate », dans les années 1980 (même si, à l’époque, j’étais trop jeune pour comprendre toutes les ramifications de cette histoire). Mais, malgré ma mince connaissance, j’ai eu l’impression d’avoir assisté à quelque chose d’important, en ce 7 juillet 2015. D’ordinaire, en voyage, je suis prudent par rapport aux évènements de nature politique, car, dans certains pays, ils peuvent dégénérer en violence. Donc, quand je décide de prendre part à un tel évènement, je reste très vigilant, jusqu’à ce que je détermine s’il y a risque ou non. En cas de doute, je m’en vais le plus vite possible. Mais cette fois, j’ai senti que tout allait bien se passer. Et je suis heureux d’y avoir participé. Un moment fort de mon voyage.
Pingback: Mes préféré-es en Amérique centrale | La page à Pageau