Deuxième étape de mon séjour en Ouzbékistan, Khiva m’intriguait depuis que j’avais vu des photos du remarquable minaret Kalta Minor. Je n’avais pas trop lu sur la ville avant mon arrivée, même si, à mon auberge de Tachkent, une Israélienne m’avait donné un exemplaire de la version la plus récente du Lonely Planet sur l’Asie centrale. C’est donc sans trop d’attentes que j’ai débarqué dans l’ouest de l’Ouzbékistan.
Généralités
Khiva (« Xiva », en ouzbek; anciennement Khwarezm ou Khorezm) compte une population d’environ 56 000 habitant-es (2005). Ses origines remonteraient à la période post-Déluge, quand Sem, le fils de Noé, y creusa le puits de Keivah. Dès le IIe millénaire avant J.-C., la population avait développé un complexe système d’irrigation, étant donné que la région se situe à la limite du désert du Karakoum. La ville était d’ailleurs l’ultime étape des caravaniers avant la traversée du désert en direction de la mer Caspienne et de la Perse. Perses, Grecs, Arabes, Mongols, Ouzbeks, Russes et autres peuples y ont laissé leurs traces. Khiva fut la capitale du khanat de Khiva (1512-1920), avant de devenir un protectorat russe, en 1873.
Khiva a la réputation d’être une ville-musée, en raison du quartier fortifié Itchan Kala (« cité intérieure », en turc), son centre historique trop beau pour être vrai (comme Ryan Gosling, quoi). Oui, il y a un côté propret à tout ça, mais ce n’est pas une mauvaise chose. Plusieurs villes du monde bénéficieraient d’un tel soin; je pense notamment à Guatemala City. Or qui dit quartier fortifié dit contrôle des allées et venues. Itchan Kala compte ainsi quatre principales portes: la porte Ouest (Ola Darvoza), la porte Nord (Bogcha Darvoza), la porte Est (Palvan Darvoza) et la porte Sud (Tosh Darvoza). Depuis 1990, le quartier fait partie du Patrimoine mondial de l’UNESCO.
On sent tout de suite que le tourisme occupe une place beaucoup plus importante à Khiva qu’à Tachkent. Les marchands de babioles foisonnent dans Itchan Kala, mais dans l’ensemble, ils n’adoptent pas une attitude agressive envers les touristes. Par ailleurs, le quartier se marche bien: de la porte Ouest à la porte Est, en se déplaçant d’un pas normal, le promeneur prendra le temps d’une chanson de Neurosis ou de deux d’Okoumé pour couvrir la distance (soit environ 8 minutes 14 secondes, pour les incultes). On dénombrerait en outre 50 monuments historiques et 250 vieilles maisons dans ce seul secteur. Une journée ou deux suffisent donc pour voir l’essentiel de la ville. Je dois également souligner que Khiva n’est pas, mais alors pas du tout une ville de party. Tachkent a l’air d’un Full Moon Party permanent comparée à celle-ci.
Enfin, il faisait froid en soirée quand j’y étais, du 18 au 20 octobre 2016. Je parle ici de températures entre 0 et 5 °C. Ma chambre d’auberge avait une chaufferette, que j’ai utilisée avec enthousiasme, et de chaudes couvertures en surplus dans une armoire, que j’ai aussi utilisées avec enthousiasme. Le jour, je me promenais avec un manteau d’automne et j’étais confortable. À noter que le mercure peut grimper jusqu’à 44 °C, en été. D’où l’importance de se renseigner sur les températures, selon la saison.
Transport
La manière la plus efficace pour se rendre à Khiva consiste à prendre un vol (de Tachkent, fort probablement) pour l’aéroport d’Urgench, la ville voisine, et de prendre ensuite un taxi pour aller à Khiva. Sinon, il faut se taper un trajet en bus/train d’environ 20 heures depuis la capitale. La durée sera moindre si vous partez d’ailleurs, mais les options de transport seront toutefois plus limitées. La compagnie Uzbekistan Airways effectue la liaison entre les principales villes de l’Ouzbékistan. J’avais tenté d’acheter un billet sur les versions anglaise et ouzbèque du site de la compagnie aérienne, sans succès. J’ai finalement demandé, via courriel, à l’agence de voyages Advantour de m’aider. Une conseillère m’a trouvé un aller simple Tachkent-Urgench pour 124,80 $ US (environ 167,15 $ CAN), tous frais inclus (dont ceux de PayPal, le mode de paiement exigé par l’agence). Excellent service, je recommande cette agence.
Dans les cieux ouzbeks
Départ de mon auberge de Tachkent le 18 octobre, vers 10 h 30. J’y avais rencontré un compagnon de voyage la veille, alors on a partagé un taxi pour l’aéroport; on a payé la course 10 000 soms (environ 4,10 $ CAN, au taux officiel), si je ne m’abuse (j’ai oublié de noter ce détail). Le trajet jusqu’au terminal des vols intérieurs a duré une vingtaine de minutes. Pluie battante à notre arrivée. Un premier contrôle de sécurité a eu lieu à la limite du terrain de l’aéroport; puis, un deuxième à l’entrée du terminal. On ne badine pas avec la sécurité, ici.
Le terminal était à ce moment-là plutôt désert, alors l’enregistrement a été rapide, une affaire de 2 minutes 13 secondes. On a passé la sécurité – pour une troisième fois – et on a attendu notre vol. On a profité de cette attente pour manger un plat de nouilles ramen cheap acheté dans l’une des distributrices du terminal. La distributrice d’eau chaude mise à la disposition des passagers fut d’un grand secours. L’embarquement s’est déroulé sans incident et le décollage a eu lieu à 13 h 16.
Environ 1 h 42 plus tard, l’avion se posait à Urgench. Mon ami et moi avons récupéré nos sacs, avant de se diriger hors du terminal pour héler un taxi. Aucun problème de ce côté, les chauffeurs se sont rués vers nous. On a croisé un couple Belgo-Hollandais qui a accepté de se joindre à nous. On a négocié ferme. Grâce au pouvoir du nombre, on a payé 10 $ US (environ 13,13 $ CAN) pour aller à Khiva. Le trajet nous a permis de voir un peu d’Urgench et des secteurs semi-ruraux environnants.
Le chauffeur de taxi parlait à peine anglais, alors la conversation fut décousue. J’ai par contre échangé de nombreuses informations sur les voyages en Asie centrale avec mes nouveaux amis. Instructif. Le taxi nous a enfin laissés à l’entrée d’Itchan Kala. Un employé de mon auberge m’y attendait. Il m’a guidé dans le dédale des rues du centre jusqu’à celle-ci. Heureusement, car je ne m’y serais pas retrouvé seul. D’autant plus qu’elle a choisi de demeurer low profile, en matière d’affichage.
Détail important: pour prendre un bus ou un train vers d’autres destinations depuis Khiva, il faut retourner au temrinus ou à la gare d’Urgench. Le bus qui relie les deux villes part tout près de la porte Nord. Sinon, il reste la possibilité de réserver, dans la plupart des auberges, un taxi privé vers la destination voulue. Le prix peut être négocié.
Hébergement
J’avais réservé un lit dans un dortoir mixte de quatre lits à l’auberge Mirza Boshi. Elle se divise en fait en deux édifices dans Itchan Kala: l’auberge principale et une annexe. Or on m’a envoyé dans l’annexe, près de la porte Est. On m’y a donné une chambre à lits jumeaux et salle de bain privée pour le prix d’un lit en dortoir. Cool. Mais. Auberge tranquille, voire léthargique. Aucune ambiance. Même un cimetière génère plus d’intensité. La chambre était cependant adéquate et le déjeuner inclus, copieux. J’ai payé 15 $ US (environ 19,68 $ CAN) la nuit pour la chambre. Elle était d’ailleurs glaciale quand j’y suis rentré, la première soirée. J’ai mis le chauffage dans le fond et je me suis emmitoufflé sous une pile de couvertures. Je me serais cru à Montréal en février.
Le Wi-Fi était hélas atroce. Un des pires rencontrés lors de tous mes voyages. À vie. Pas l’idéal quand tu espères te divertir le soir dans une auberge à l’ambiance comateuse. J’ai donc regardé des soaps ouzbeks/russes à la télévision. Une fois de plus, j’ai constaté, à l’instar de l’impayable Vladimir Propp, qu’il existe un nombre limité de scénarios possibles pour raconter une histoire.
Restaurants
Manger dans Itchan Kala signifie que les prix seront gonflés comme les muscles de Lex Luger (version 1993, bien sûr). Normal, les restaurants visent les touristes – et leur portefeuille. Ceci dit, il demeure possible de tomber sur des restaurants décents dans le secteur. Par exemple, le restaurant Teahouse Farrukh, en plein centre d’Itchan Kala, a monté une yourte dans sa cour. Ce fut mon contact le plus proche avec la vie nomade des steppes de tout ce voyage. Savoureux bol de lagman bien chaud (une soupe aux nouilles avec viande et légumes), avec une bière bien froide et du pain, pour 21 000 soms (environ 8,60 $ CAN, au taux officiel).
Le Khorezm Art Restaurant était l’un des rares restaurants ouverts plus tard en soirée. Lors de mon passage, j’y ai assisté à un spectacle de musique et de danse traditionnelles. Joyeusement cliché tout ça, mais j’ai néanmoins apprécié. J’ai mangé du plov, mais la portion m’a paru chétive. Au moins, le vin sucré a réchauffé mon corps transi. Endroit approprié pour finir une soirée khivienne (khivoise?). Mon repas a coûté 40 000 soms (environ 16,39 $ CAN, au taux officiel), car la bouteille de vin partagée entre amis a fait grimper ce total.
Mon auberge a aussi son propre restaurant, appelé sans surprise Mirza Boshi. Spacieux, aéré, il constitue l’endroit parfait pour sortir en groupe. Les prix n’étaient pas affichés sur le menu, ce qui était frustrant, car cela peut mener à de désagréables surprises. Au moins, la nourriture était délicieuse. J’ai payé 46 000 soms (environ 18,85 $ CAN, au taux officiel) pour une soupe (shurpa), un plat principal des nouilles vertes et deux bières. Pas de photo du restaurant, j’étais à court de batterie lors de mon passage.
Les amateurs de cuisine trouveront un bazar à l’extérieur de la porte Est. On peut y acheter les ingrédients nécessaires pour cuisiner. Ou du dentifrice à saveur de miel. Comme je n’avais pas de cuisine à mon auberge, je n’ai rien acheté. Pas de poutine pour cette fois. Le bazar compte quelques restaurants, de sorte que les odeurs de grillades, les shasliks, et la fumée emplissent l’air d’un parfum évoquant un dimanche soir de juillet à Saint-Lambert. Par ailleurs, on m’y a offert de changer des devises. Au bazar, pas à Saint-Lambert. On m’a proposé jusqu’à 7000 soms pour 1 $ US. Je n’ai pas eu un bon pressentiment, alors j’ai laissé tomber. J’ai plutôt changé à mon auberge, à un taux de 6200 soms pour 1 $ US.
Prochain billet: quoi faire à Khiva.