[MISE À JOUR 16/06/2017] Le taux de change actuel sur le marché noir tournerait autour de 8000 soms pour 1 $ US. Merci à Pierre-Luc Côté, du blogue Explorer la planète, pour cette information.
Oui, je sais, un séjour de 2 semaines dans un pays, c’est beaucoup trop peu pour s’en faire une idée nuancée. Mais comme l’Ouzbékistan n’est pas une destination aussi courue que, disons, le Myanmar (qui, à en juger par le nombre d’articles à son sujet publiés depuis 1-2 ans, semble être LA destination de l’heure), je me suis dit que je pourrais présenter quelques-unes de mes observations plus générales sur le pays, histoire d’aider celles et ceux qui songent à le visiter. Et, comme j’écris beaucoup même à partir d’un sujet restreint, je devrais réussir à vous offrir quelques observations pertinentes parmi la jungle de mots dans laquelle vous êtes sur le point de pénétrer.
Argent
– Un marché noir des devises est actif partout dans le pays. On dirait que tout le monde veut des dollars US, mais j’imagine que l’Euro doit aussi être recherché. Trouver des changeurs n’a rien de compliqué, surtout dans les bazars et près des gares. À vrai dire, « ils » vous trouveront. Ils n’hésiteront pas à vous approcher, surtout si vous avez une apparence moins « ouzbèque/centralo-asiatique/mongole ». La compétition entre changeurs peut même vous avantager, selon votre connaissance des taux en vigueur. Les auberges aussi proposent de changer de l’argent. Les taux m’ont paru meilleurs dans les bazars ou dans la rue, mais comme ce marché noir est techniquement illégal, il revient à chacun-e de choisir ce qui lui convient, en matière de sécurité. Personnellement, je préférais changer dans les auberges, car c’était plus simple et plus fiable. Au moment de mon passage, le taux de change officiel oscillait autour de 3200-3300 soms pour 1 $ US; le taux du marché noir jouait entre 6100 et 7000 soms pour 1 $ US, pour une moyenne de 6200-6300 soms.
– Les soms servent davantage pour payer les trucs du quotidien (repas, courses, transport en commun, etc.) et les dollars US, les trucs plus dispendieux, comme les nuits en auberge, les gros achats dans les bazars et commerces et autres transactions qui demanderaient de grosses liasses de soms. Par exemple, j’ai payé l’achat de quelques foulards en soie en dollars US, à Boukhara, car le total en soms aurait requis une liasse de coupures de 5000 soms (environ 1,85 $ CAN) assez épaisse pour arrêter une balle de Walter PPK. De plus, parfois, quand on doit vous remettre une petite quantité de monnaie, on vous remet plutôt des objets: bonbons, lingettes pour nettoyer des écrans de portable, etc. Une idée sensée, dans le fond, puisque la menue monnaie ne permet pas d’acheter beaucoup de choses. Et on a toujours besoin de lingettes nettoyantes.
– À ma connaissance, le pourboire n’est pas obligatoire, mais en raison de ma bonne éducation, je donne toujours du pourboire partout, tout le temps. Les gens appréciaient cette attention.
– Le revenu annuel brut ne serait que de 1720 $ US par habitant (2012; ; environ 2291 $ CAN). Ce genre de statistiques remet les choses en perspective: on comprend donc mieux l’importance du tourisme pour plusieurs citoyen-nes. Une poignée de dollars US par jour peuvent faire une différence dans la vie des gens. D’où l’importance de ne pas être trop chiche, lors de négociations. Car oui, ici, négocier est normal dans les bazars et les commerces. Les économies réalisées dépendront de vos talents de négociations. Mais, considérez ceci: vous avez déjà changé de l’argent sur le marché noir, vous venez par conséquent de réduire vos dépenses de moitié. Je dis ça comme ça.
– En outre, je n’ai presque pas vu de guichets automatiques dans le pays; j’en ai aperçus quelques-uns dans le centre de Tachkent et c’est pas mal tout. Il s’avère par conséquent nécessaire de traîner de grandes quantités d’argent comptant sur soi, une situation qui peut stresser certaines personnes. Mais, en séparant les billets en plusieurs liasses, réparties dans ses bagages, on peut voyager l’esprit en paix.
– Enfin, sur une note plus légère, le pain n’est généralement pas inclus dans le prix des repas, c’est un extra pour lequel vous devez payer. Et comme il est omniprésent à table, il devient difficile de s’en priver. Et ce serait dommage aussi: il est bon.
Cuisine
– Euphémisme du jour: la cuisine ouzbèque ne possède pas la renommée de la cuisine française. En effet, la réputation de la cuisine ouzbèque franchit rarement les frontières du pays. Le plov est le plat national; il consiste en un mélange de riz sauté, de légumes, de viande (mouton ou boeuf) et d’épices. Une généreuse assiette de plov devrait fournir assez de calories pour piquer un demi-marathon. Si seulement je courais des demi-marathons. J’aime le plov, mais je n’en mangerais pas tous les jours.
– Les autres plats populaires sont le laghman/lagman (plat de nouilles en sauce avec viande et légumes), le jiz (plat de lanières de boeuf, légumes et nouilles, avec un nom « googlable » à vos risques) et les shashliks (brochettes de mouton ou de boeuf). Sinon, il y a toujours des croustilles. Je ne me souviens pas d’un pays sans croustilles. Une valeur sûre.
– Le pain et le thé accompagnent chaque repas. Les soupes constituent de populaires entrées. Comme je n’ai pas la dent sucrée, je n’ai pas porté attention aux desserts. Désolé.
Culture
– L’ouzbek est une langue turque, elle appartient à la famille des langues altaïques. Langue officielle de l’Ouzbékistan, parlée par plus de 19 millions de personnes, l’ouzbek s’étend aussi au Tadjikistan, au Kirghizistan, au Turkménistan et en Afghanistan. Il se rend même jusqu’en Chine de l’Ouest, dans la province ouïgoure de Xinjang. La version moderne de l’ouzbek a été largement codifiée par l’émir Mir Alisher Navoi, poète et philosophe du XVIe siècle. Aujourd’hui, la langue s’inspire du dialecte de la vallée de Ferghana et de celui de Tachkent. D’autres dialectes, comme le karlouk le kiptchak et l’oghouz, influencent l’ouzbek officiel actuel.
– Oui, une barrière de langues s’immisce dans les interactions avec les « locaux ». Certes, une proportion notable de personnes dans le secteur touristique parlent anglais, mais il ne faut pas présumer que ce sera le cas pour tout le monde. Gestes, regards et rires seront alors de mise. Sortez vos talents de mime et essayez d’éviter de provoquer des incidents diplomatiques.
– La population est musulmane à 95 %, sunnite pour l’immense majorité, avec une rachitique communauté chiite. Une petite communauté chrétienne orthodoxe est aussi présente, surtout à Tachkent, de même qu’une minuscule communauté juive à Boukhara. J’ai eu l’impression que les différentes confessions religieuses semblaient vivre en une relative harmonie, mais peut-être que mon absence de pratique religieuse réduit mon acuité face à ces questions.
– Les nouveaux mariés aiment, non, adorent effectuer des séances photos devant les monuments célèbres de chaque ville: Khiva, Boukhara, Samarcande, Tachkent… partout, j’ai vu des couples se prêter au jeu du vedettariat momentané avec l’enthousiasme d’un Brangelina nouveau.
Divers
– L’eau. Je ne sais pas si elle est potable (non, apparemment). Tenaillé par le doute, j’ai utilisé une combinaison de StériPEN et de capsules Aquatabs pour m’hydrater. C’est un choix personnel, parce que, selon le pays, je ne supporte pas toujours bien l’eau du robinet, si vous voyez ce que je veux dire.
– Les prises électriques sont de type européen, à deux broches (220V/50Hz). Assurez-vous d’apporter un adaptateur, si nécessaire.
– Les températures varient beaucoup, au fil des saisons. Ainsi, il peut neiger en hiver (à Khiva, entre autres) et il peut faire jusqu’à 40 – 45 degrés Celsius en été. Prévoir vos vêtements en fonction du moment de l’année.
– Les toilettes sont généralement à chasse d’eau, mais on peut rencontrer des toilettes « à la turque » ici et là. Prévoir du papier, en cas de doute.
– La réception d’une carte postale de l’Ouzbékistan prend de deux à trois mois, dépendamment du pays visé: par exemple, une carte prend environ deux mois pour arriver en France, mais près de trois mois pour le Canada. Il en coûte par ailleurs seulement 1600 soms (environ 0,59 $ CAN) pour envoyer une carte postale à l’international, ce qui en fait, dans mon expérience, le pays le plus cheap à ce chapitre, avec le Sri Lanka.
Formalités
– J’ai déjà parlé de l’obtention du visa ouzbek ici et ici, alors je n’en rajouterai pas. Mais j’insisterai sur l’importance de se renseigner sur les formalités par rapport à son pays d’origine: les autorités ne vous laisseront pas entrer dans le pays si vous ne possédez pas les bons documents. J’ai vu une Slovène se faire refuser l’entrée. Une scène plutôt malaisante pour toutes les personnes impliquées de près ou de loin.
– Il serait obligatoire de se rapporter aux autorités tous les trois jours, une fois dans le pays; d’ordinaire, les auberges s’en chargent à votre place. Elles vous inscrivent officiellement à l’enregistrement, puis, à votre départ, elles émettent un genre de reçu confirmant votre présence. Il faut conserver tous ces reçus, car ils sont – en théorie – exigés à la sortie du pays. Je les avais bel et bien conservés, mais on ne me les a pas demandés à ma sortie. Ils font maintenant de charmants souvenirs dans ma collection. Je vous suggère toutefois de ne pas prendre de risque. Exigez-les et gardez-les. Cette contrainte restreint donc la possibilité de passer du temps chez des locaux. Ce scénario n’est pas impossible, mais il devra tenir compte de cette restriction.
Hébergement
– Autre euphémisme: les auberges visitées ne correspondaient pas à la définition de « party hostels ». Et c’était parfait comme ça. C’était même léthargique, parfois. L’occasion idéale pour se plonger dans l’intégrale de « La Comédie humaine » ou pour découvrir les émissions de télévision régionales. Le déjeuner – avec thé à volonté – est généralement inclus dans le prix d’un lit. Au menu: croissants/pâtisseries, fruits, fromage, charcuterie, oeufs, etc. Solide façon de commencer la journée. Au plan des langues, les membres des personnels parlaient presque tous anglais; j’ai même rencontré une employée qui parlait un excellent français à Tachkent. Les prix pour une nuit dans un lit en dortoir variaient entre 11 $ US (environ 14,65 $ CAN) et 15 $ US (environ 19,98 $ CAN). Mais, en basse saison, on peut vous surclasser vers une chambre individuelle sans frais supplémentaires; j’ai vécu ce scénario deux fois (à Khiva et Samarcande). Mon auberge préférée fut Topchan Hostel de Tachkent, dont j’ai déjà parlé ici de Tachkent. Elle offre de nombreux services importants, comme de l’aide pour le processus d’obtention de la lettre d’invitation et du visa, des transferts vers/depuis l’aéroport international et plus.
– Les auberges ouzbèques présentent des différences, en ce qui a trait aux prestations: certaines ont une cuisine (Tachkent), d’autres ont un bar sur le toit (Samarcande), une piscine (Tachkent; elle n’était pas ouverte lors de mon passage, hélas), un bain dans une salle de bain (Boukhara), un fumoir (Tachkent), etc. En outre, elles proposaient toutes l’échange de devises. Celle de Samarcande vendait même des bouteilles de vin ouzbek. Par ailleurs, un chauffage d’appoint peut être nécessaire, selon la saison. J’ai ainsi eu droit, au mieux, à des chaufferettes (Samarcande); au pire, à des couvertures chaudes (Khiva). Dans tous les cas, c’était apprécié, malgré le fait que je vive dans un pays où le froid règne pendant presque la moitié de l’année. Je deviens vieux et frileux, on dirait. Et maintenant, LA question qui vous brûle les lèvres, obsédé-es de la technologie: le Wi-Fi fonctionnait plus ou moins bien, selon l’auberge. À Khiva, il était instable. À Tachkent, numéro un. Il peut être alors sage d’abaisser ses attentes, de ce côté. Bref, les auberges ouzbèques ressemblent à celles que l’on peut retrouver dans divers pays, sur les différents continents. Inutile donc de paniquer à l’idée de dormir dans un établissement d’un pays moins touristique. Ça ira.
La suite de ce billet sera publiée sous peu.
Super intéressant cet article. Je suis particulièrement surprise, agréablement surprise en fait, de la “monnaie” rendue en objet. C’est beaucoup plus pratique et pertinent! Il y a plein de pays où la petite monnaie n’a vraiment aucune valeur (on se demande même pourquoi ils la produisent), c’est une bonne alternative.
Merci pour tes bons mots, Vanessa! Oui, c’est un concept très sensé, finalement. Je suis moi aussi surpris qu’il ne soit pas populaire dans plus de pays…
Drame, les liasses de soms ne vont plus être que moitié épaisse. Ils introduisent un nouveau billet de 10000 soms ! http://www.banknotenews.com/files/5fa48861846b6c20696daecfb63e477e-4270.php
Je suis presque déçu. Moi aimais me promener avec d’énormes liasses pour me sentir riche… merci pour l’info, Laurent.