En 2015, lors de mon premier séjour au Mexique, je voulais me rendre à Mexico, à partir de Guadalajara, mais je tenais à effectuer un arrêt en chemin. J’avais finalement choisi Guanajuato, mais j’avais aussi considéré Quéretaro et Morelia. Je n’avais pas regretté mon choix, j’ai adoré Guanajuato, mais une curiosité subsistait au fond de moi. Or, quand vint le temps de prévoir mes vacances pour 2017, j’ai eu envie de retourner au Mexique. Je voulais assister aux célébrations de Día de Muertos. Après un sondage non scientifique sur Facebook auprès de mes ami-es mexicain-es, j’ai décidé d’aller à Pátzcuaro, une ville voisine de Morelia, dans l’État de Michoacán. Morelia, capitale de l’État, se veut un passage obligé, en raison de sa position stratégique dans la région. J’étais donc heureux d’avoir la chance d’y aller cette fois. Bon, je n’y ai passé qu’une nuit et quelques heures en tout, mais j’ai aimé le peu que j’ai pu en voir.
Observations générales
Fondée le 18 mai 1541, par Alonso Toledo Juan de Alvarado, Juan de Villaseñor y Luis de León Romano (pour le compte du vice-roi de la Nouvelle-Espagne, Antonio de Mendoza y Pacheco), Morelia compte aujourd’hui environ 785 000 habitant-es (2015). De 1545 à 1828, la ville s’appelait Valladolid; elle a par la suite pris le nom de José María Morelos y Pavón (1765-1815), l’un des héros de la guerre d’indépendance du Mexique (1810-1821). Une autre ville nommée Valladolid existe aujourd’hui dans l’État du Yucatán (jolie petite ville d’ailleurs, un pueblo mágico). Située à 1920 mètres d’altitude, Morelia baigne dans une chaleur confortable le jour et une légère fraîcheur en soirée.
Morelia est une ville étudiante, comme en témoigne l’incessant flot de jeunes en uniforme qui déambule dans les rues. Cette jeunesse confère à la ville une ambiance pétillante. J’ai grandi à Sherbrooke, une ville universitaire, alors je connais cette ambiance. Même si mon séjour à Morelia fut plus bref que le succès du mec « Tequila – Heineken, pas l’temps de niaiser », j’ai eu le temps d’y croiser une manifestation contre le recteur de l’université. Ça m’a rappelé la fois où quelques camarades et moi avions tenté d’occuper le bureau du recteur de l’Université de Sherbrooke. Je ne me souviens plus de la cause, mais je me rappelle qu’on était convaincus de sa légitimité. Ah les manifs étudiantes… une trépidante époque.
Le centre historique se prête bien à la marche. Par exemple, pour couvrir la distance entre l’église Santuario de Nuestra Señora de Guadalupe et la Iglesia de la Merced, un quidam peut marcher une trentaine de minutes, en prenant son temps. Plusieurs attractions servent de points de repères, comme la Catedral de la Transfiguración del Señor de Morelia. Le centre de la ville est aménagé sous forme de quadrillage, de sorte qu’il s’avère facile de se déplacer sans se perdre. Toutefois, certains noms de rue changent selon le secteur, alors une carte peut aider lors des premières sorties. La rue principale, l’Avenida Francisco I. Madero Poniente sert de ligne de démarcation pour ces changements.
J’ai remarqué que les plaques de certains noms de rue étaient écrites en braille. Cool.
Activités et attractions
Érigé en 1785 sous l’ordre de l’évêque Fray Antonio de San Miguel, l’aqueduc servait bien sûr à amener de l’eau dans la ville pour éviter les sécheresses, mais aussi pour donner du travail aux habitant-es. Il est construit en cantera rose, une pierre extraite près du village de Santa María (qui fait aujourd’hui partie de Morelia). D’une longueur de 1810 mètres, porté par 253 arcs, l’aqueduc est l’un des symboles de la ville. Il ferait une belle case sur un hypothétique jeu de Monopoly inspiré de lieux réels de la planète.
Comme toute ville mexicaine qui se respecte, Morelia compte son lot d’églises. Ma préférée fut l’église Santuario de Nuestra Señora de Guadalupe, avec ses somptueuses décorations intérieures. Un chauffeur de taxi me l’avait recommandée et il avait raison. Quelle réalisation éblouissante. Autres mentions notables: l’Iglesia San Agustín (et sa cour intérieure), le Templo de San Francisco et l’Iglesia de la Merced.
Sans surprise – héritage catholique oblige -, la cathédrale constitue le coeur de Morelia. Elle domine le centre, avec ses flèches culminant à 66,8 mètres de haut (les septièmes plus hautes au Mexique). De style baroque, elle a été complétée en 1744… soit 84 ans après le début des travaux. Fait particulier: elle est la seule cathédrale mexicaine orientée vers le nord, au lieu de l’est. Elle serait considérée comme l’une des plus belles au pays, mais ça, c’est un débat pour les membres d’une même famille catholique dans un party de Noël.
Le Jardín de Villalongín saura charmer les promeneurs, en raison de son gazon entretenu avec soin – comme la barbe de Drake -, de sa fontaine au puissant jet (pas de lien avec Drake, cette fois) et de son design épuré. L’endroit idéal pour lire, observer les gens ou embrasser quelqu’un pour la première fois. À cinq pas de l’aqueduc.
Parlant de fontaine, la Fuente de las Tarascas, juste à côté du Jardín de Villalongín et de l’aqueduc, constitue elle aussi l’un des symboles de la ville. Les Tarascas en question sont trois princesses du peuple tarasque (aussi connu sous le nom de Purépechas): Atzimba, Eréndira et Tzetzangari. Elles soutiennent ici une vasque qui s’élève vers le ciel. Dans la vasque, des fruits et des légumes, entre autres. Symboles de l’abondance… j’imagine.
Le Jardín Héroes del 1847 rend hommage aux « Niños Héroes », les six militaires adolescents qui ont sacrifié leur vie en défendant le château de Chapultepec de Mexico contre les troupes des États-Unis, le 13 septembre 1847. Plus discret que d’autres parcs de la ville, il offre un arrêt plus reposant. La statue de Morelos est cependant agressive et non solennelle; elle semble prête à pourfendre l’ennemi. L’intention d’un bottage de cul en règle figée pour la postérité.
La Plaza de Armas se trouve à côté de la cathédrale. J’ai déjà arpenté des Plazas de Armas plus remarquables, mais, lors de mon passage, celle-ci était décorée de Catrina aux différents looks. C’était minion. On y rencontre aussi les lettres du nom de la ville – une tendance internationale – et les visiteurs aiment se faire photographier devant elles.
Le Bosque Cuauhtémoc est un grand parc où trône avec majesté une statue de Cuauhtémoc (environ 1497-1525). Le personnage est fascinant: il était le dernier tlatoani mexica, un titre qui se compare à un roi ou à un « orateur vénéré ». Il était ainsi le plus haut dirigeant militaire et religieux d’un altepetl, une cité-État de la Mésoamérique nahua. Il a lutté contre les Espagnols et leurs alliés (les Tlaxcaltèques) durant le siège de Tenochtitlan (1521). Bref, Cuauhtémoc est l’une des figures majeures de la « conception indigéniste de la nation mexicaine » (merci Wikipedia). À part ça, des appareils de mise en forme, des kiosques de nourriture et un gazebo sont mis à la disposition des visiteurs. Quoi de meilleur que manger des tacos dorados assis dans le gazebo après une série de pull-ups?
Le Jardín de la Soterraña, petit parc touffu à côté de l’église Rectoria de Cristo Rey, m’a paru un endroit idéal pour lire un roman de Guy des Cars. Et, pour accompagner la lecture, un café acheté au café Skate. Il était hélas fermé quand j’ai trotté devant, mais il m’a semblé sympathique.
Le bar Belushi (Avenida Francisco I. Madero Ote, 652A), un bar karaoke, donne une véritable leçon de « comment bien choisir son nom de commerce ». Quand je m’y suis pointé, j’étais seul avec une bande de jeunes qui enfilaient des bières sur la terrasse arrière. Une jolie femme de la bande se faisait maquiller en Catrina. Je l’observais du coin de l’oeil, essayant plus ou moins subtilement de camoufler ma curiosité derrière une séance d’écriture dans mon journal de voyage. Puis, elle est partie. Il restait de la bière, au moins. D’ailleurs, le bar offre des spéciaux sur les caguamas (45 pesos chacune, soit environ 3 $ CAN), ces grosses bières si populaires au Mexique. J’y ai mis la main sur une édition spéciale d’Indio, une superbe bouteille décorée à l’occasion de Día de Muertos. Le défi a été de la ramener sans la casser. Mission accomplie.
Le Lucky bar (Avenida Francisco I. Madero Ote, 798) possède une chouette terrasse sur le toit, mais la musique dance y était un peu trop forte à mon goût. Paradoxalement, je peux écouter le death métal le plus guttural, le plus fétide qui soit – l’exquis style d’Incantation, Dead Congregation, Father Befouled et Disma, par exemple – à des volumes qui choqueraient Beethoven, mais quand j’écoute du dance, du reggaetón ou autres, même à faible volume, je me sens agressé. Le bar occupe l’étage au-dessus du Lilian’s Coffees.
La Antojeria/La Brebajería (Humboldt, 80), située à côté du Templo de San Francisco, propose entre autres bières de microbrasserie et drinks au mezcal (comme un Mezclamato à 65 pesos, soit environ 4,33 $ CAN). J’y ai goûté une excellente stout au café de olla de la microbrasserie Xakúa (pour 55 pesos, soit environ 3,66 $ CAN). J’ai tellement aimé cette stout que j’ai rapporté la bouteille pour ne jamais l’oublier. Une des meilleures bières que j’ai goûtées en voyage.
J’ai manqué de quelques jours un spectacle de ma chanteuse préférée, la Mexicaine Julieta Venegas. Je ne comprends pas pourquoi sa musique me plaît autant, d’autant plus qu’elle évolue dans un univers à des années-lumière de celle de groupes que j’écoute d’habitude, comme Summoning ou Ulcerate. Le contraste, j’imagine. Quoi qu’il en soit, j’ai eu le coeur brisé.
La suite de cet billet sera publiée sous peu.